Assemblée Générale du 16-01-2023

Transcription et résumé des interventions en visio lors de l’AG 2022 de l’Atelier Généalogique

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Intervenants (de l’AG qui a eu lieu dans les locaux de l’Association des Coratins de Grenoble) :

 

Catherine Virlouvet, historienne, Université Aix-Marseille, ancienne directrice de l’Ecole Française de Rome

Stéphane Mourlane, historien, Université Aix-Marseille

Anne-Marie Granet-Abisset, historienne, Université de Grenoble (tous trois membres de notre comité de suivi scientifique)

Louise Luquet (Musée de l’Histoire de l’Immigration, Paris)

Jérôme Soldeville (Ville de Grenoble)

James Smith, (Atelier Généalogique)

Pierre Marzocca (Association Chemin à l’Envers)

Nino Miscioscia (Atelier Généalogique)

(mes commentaires sont en italiques, et les chiffres se réfèrent à la chronologie de la vidéo)

1. La numérisation des archives paroissiales à Corato (1.00)

Arrivée de Pierre Marzocca, qui a numérisé une partie des archives paroissiales.

Catherine : Où est le blocage de la numérisation des archives paroissiales ? D’où vient le blocage de la part de la conférence épiscopale italienne ? Quel levier pourrait-on utiliser ? Un jeune Docteur aurait difficulté à obtenir des rendez-vous avec le prêtre responsable des Archives (qui n’admet pas qu’un autre que lui touche aux archives. J’avais raconté que je n’avais eu que deux entretiens avec le prêtre pour consulter les archives à Corato, en presque 3 mois).

Catherine : Donc impossible de mener une recherche sur place, dans ces conditions.

Pierre explique que les registres de catholicité sont des archives privées de l’Église, sous l’autorité de l’évêque, au même titre que les registres de catholicité en France. (Pas vraiment comparables, cependant : les archives paroissiales françaises sont presque toutes en ligne). Pierre poursuit : les registres de catholicité (ceux d’après 1792, suite à la Révolution) ne sont pas photographiables en France, et souligne qu’il faut faire la distinction entre ceux-là et les archives paroissiales d’avant 1792. A partir d’une loi du 20 septembre 1792, l’Église locale était sommée de donner tous ses archives au Maire. Il rappelle aussi qu’il n’y a pas eu de Révolution en Italie. En Italie, le blocage vient du président actuel de la conférence épiscopale. (En 2008, quand Pierre a fait sa numérisation, ce n’était pas les mêmes autorités en place en Italie).

Catherine raconte son expérience de directrice de l’École Française de Rome : le pontificat de Pie XII était ouvert à la consultation des archives de l’Église au Vatican. Il est donc paradoxal qu’il existe un bon système d’archivage et de consultation (non numérisé) à Rome, alors qu’au niveau local, ce n’est pas le cas. Pierre a voulu réitérer que les archives paroissiales sont consultables sur place à Corato, mais Catherine lui a rappelé mon expérience (voir plus haut).

Pierre raconte l’historique de sa numérisation à Corato. En 2007, le prêtre responsable de l’époque a vu son matériel et l’a invité à venir numériser toutes les archives, ce qu’il a fait l’année suivante. Il explique que la situation a changé depuis qu’il a fait la numérisation en 2008 : le prêtre de 2008 a été remplacé, en particulier.

2. L’exposition ‘Ciao Italia’ (10.50)

Stéphane Mourlane se présente comme historien spécialisé sur l’immigration italienne en France, et commissaire scientifique de l’exposition ‘Ciao Italia’, lancée avec beaucoup de succès en 2017 par le Musée National de l’Immigration à Paris. Il nous informe également que cette exposition est itinérante et qu’il y a une version en italien, qui a été montrée dans plusieurs villes italiennes.

‘Ciao Italia’ décrit comment les immigrés Italiens ont fait la France. L’exposition elle-même ne porte pas uniquement sur les migrations mais aussi sur l’apport culturel des Italiens immigrés. Elle porte sur les lieux de cette immigration, ses étapes, les occupations et les métiers. Jusqu’aux années 60 les Italiens étaient la première nationalité étrangère des immigrés en France, sur le plan du nombre.

Le Musée propose que puisse se faire de nouveaux panneaux pour cette exposition portant sur l’immigration italienne dans les lieux de l’exposition, comme cela s’est fait pour le Gers, avec la collaboration des Archives Départementales.

Stéphane rappelle que l’exposition devait prendre fin en février 2023, mais que, face a la demande, le musée a accepté de prolonger sa ‘vie’. ‘Ciao Italia’ pourra donc donner de la visibilité et de la résonance à notre projet, en particulier si elle est exposée à Grenoble même (à la Maison de l’International ?).

3. La confection de nouveaux panneaux de ‘Ciao Italia’ (16.41)

Louise Luquet annonce que l’exposition va être renouvelée pour cinq ans. Il peut y avoir des réactualisations de certains panneaux, ainsi que la production de nouveaux panneaux.

James Smith: Nous allons donc pouvoir rédiger de nouveaux panneaux cette année, qui pourraient porter pas seulement sur Grenoble mais sur d’autres destinations des émigrés coratins. Avec le comité de suivi scientifique, nous allons faire une Journée d’Étude sur la migration coratine, afin que les nouveaux panneaux soient les plus parlants possibles.

Notre partenaire Marina Labartino souhaite que cette exposition puisse être vue à Corato. Ce sera un aspect important de notre projet pour que tous les services de la Mairie y soient impliqués. La demande à la Mairie de Corato d’exposer‘Ciao Italia’ devrait être faite par la Ville de Grenoble, si possible.

Stéphane précise que le Musée apprécierait qu’il y ait une espèce de concours pour ce qui est du choix des sujets pour les nouveaux panneaux. Il faut privilégier les documents et des textes incisifs et précis. Stéphane est à notre disposition pour des relectures, et il souligne que des collègues comme Anne-Marie Granet-Abisset et Eric Vial pourront aussi apporter leur contribution.

Anne-Marie pense que ces nouveaux panneaux devraient tenir compte de ce qui existe déjà à Grenoble car il y a déjà eu une exposition en 1988. Il serait intéressant que ces panneaux permettent de réfléchir aux évolutions de ce que cela veut dire de travailler sur les migrations quand on est à cinq ou à six générations après. Ce n’est plus le même contexte, il y a des choses qui ont été acquises. Elle a encadré une thèse sur les générations des migrations. Et il ne faut pas refaire ce qui a déjà été dit ou fait, et aussi situer les migrations coratines dans le contexte des autres migrations italiennes. il faut se demander pourquoi toutes ces mémoires et ces compétences familiales ont accepté de se laisser visibiliser.

Anne-Marie mentionne l’histoire des pizzerias sur les quais (Il semblerait qu’elle fasse allusion à une époque dans les années 70 où elles n’auraient pas eu bonne presse, mais c’est à vérifier, je me trompe ?…).

Il faudra sans doute préciser le sens des ‘allers-retours’ (qu’est-ce que ça veut dire exactement ?). Anne-Marie pense que les nouveaux panneaux devraient aussi se situer dans le cadre des nouvelles migrations.

Stéphane affirme qu’il verrait beaucoup d’intérêt à ce qu’il y ait des échanges entre les descendants d’immigrés coratins et les historiens.

4. Coopérations diverses entre universitaires et descendants d’émigrés (33.44)

James : je rappelle pour quelle raison Dominique D’Introno m’avait contacté pour rédiger son histoire à l’attention de ses enfants et petits-enfants « Pour qu’ils sachent qui nous sommes, d’où nous venons et ce qu’il a fallu faire » ; et pourquoi il était parti de Corato. L’universitaire Rosalba Palermiti, spécialiste de la communication, l’a aidé à produire un petit livre destiné à sa famille.

Nino Miscioscia relate en résumé l’histoire de Dominique, en commençant par sa traversée des Alpes en 1946, à l’âge de 6 ans.

James : Un récit, tiré du petit livre, est sur notre site Web : https://www.emigrazione-corato.org/blog/temoignages/temoignage-de-dominique-d-introno.html

Dominique est venu avec moi à une rencontre avec Anne-Marie dans son bureau à l’université, et par la suite elle a demandé à deux de ses étudiants (Anastasia Chauchard et Eliott Bouanchaud) de faire une étude sur l’identité des Coratins grenoblois.

Anne-Marie : C’était pendant la période du Covid : par conséquent, l’étude s’est déroulée avec pas mal d’obstacles, et aurait pu être beaucoup plus approfondie ; mais elle fut publiée par la suite dans la revue dirigée par Philippe Hanus1. Anne-Marie pense qu’une étude à ce sujet est à reprendre.

J’informe que le directeur du Musée Dauphinois, Olivier Cogne, a dit qu’il nous ouvrirait les archives sur la première exposition de 1988 et qu’il nous propose d’organiser une réunion publique à l’automne 2023. J’affirme aussi que depuis 100 ans les migrations coratines ont apporté leur pierre à la construction de l’Europe.

J’accueille Nicholas Marzocca, directeur de l’association de quartier, Maison pour Tous St Laurent, et Jérôme Soldeville, Conseiller municipal et responsable de l’histoire de Grenoble.

Jérôme Soldeville intervient et je l’informe que nous devons chercher des financements sans doute auprès de la ville de Grenoble. (Malheureusement il y a eu un problème au niveau du son pendant son intervention).

Jérôme a parlé de son métier de professeur d’histoire au lycée Emmanuel Mounier, et des liens maintenus avec Corato par la Maison de l’International à Grenoble. Avec un professeur d’italien, il va poursuivre l’idée d’une coopération scolaire concernant la migration coratine, entre une école de la région de Grenoble et une école à Corato (ce projet pourrait sans doute être suivi au niveau universitaire).

Nino Miscioscia intervient pour résumer ce qui ont été, selon lui, les différentes vagues de l’immigration coratine. Il parle de la première vague dans les années 20. Pourquoi Grenoble ? Parce que c’est près de la frontière et ce sont des raisons économiques qui ont poussé les gens à venir d’Italie...et beaucoup plus rarement pour des raisons politiques, notamment à cause du fascisme. Les gens ont fui surtout à cause de la misère et ça s’est poursuivi jusqu’aux années 60. Après, c’est l’Allemagne qui a pris la relève, puisque c’était un pays en plein boom. Et puis il y a eu le Venezuela, l’Argentine, Brésil, etc. où les conditions de travail étaient affreuses.

5. Perspective de co-organisation d’une réunion publique avec le Musée Dauphinois (47.40)

Je parle du projet de réunion publique au Musée Dauphinois (la date exacte n’est pas encore fixée, mais le Directeur, Olivier Cogne, a parlé de l’automne). Elle pourrait peut-être intervenir peu après la Coupe du Monde de rugby en septembre/octobre de cette année. Le comité Isère Rugby dont fait partie Joseph Marzocca (un membre de notre association Atelier Généalogique) organisera des manifestations culturelles pendant la Coupe du Monde, car l’équipe d’Italie sera basée à Bourgoin. Le Comité Isère Rugby utilisera l’exposition ‘Ciao Italia’, sans doute sans les nouveaux panneaux sur la migration coratine. Il n'est pas prévu que ‘Ciao Italia’ soit exposée au Musée Dauphinois. Cependant, la réunion publique pourrait peut-être prendre la forme d’une fête pour célébrer le jumelage entre Grenoble et Corato.

Anne-Marie demande quand est-ce que les nouveaux panneaux devront être rédigés. Elle affirme que, si Olivier Cogne a hésité, c’est que les musées ont une programmation très serrée. Olivier connaît l’exposition de 1988 qui était une exposition très sensible autour d’objets prêtés par les familles pour exemplifier le rapport des immigrés coratins avec la migration, et avec la terre quittée. Elle rappelle aussi que les nouveaux panneaux de ‘Ciao Italia’ pourraient ne pas uniquement porter sur les migrations coratines mais sur ce que ça veut dire d’être des descendants d’émigrés.

Elle soulève aussi la question du rapport à l’espace : du Musée Dauphinois à la rue Saint-Laurent. Il y a un côté symbolique du Musée Dauphinois, se trouvant directement au-dessus de la rue Saint-Laurent, où les Coratins vivant dans les locaux du ‘couvent d’en haut’ venaient puiser de l’eau à la fontaine en bas de l’escalier.

Elle parle des générations parce qu’au moment de la première exposition en 1988, il y avait des descendants coratins qui n’étaient jamais allés au Musée Dauphinois et ne connaissaient pas le rapport avec la migration coratine. Au moment de cette réunion publique, il faudra faire resurgir les idées fortes en rapport aujourd’hui à cette migration. Elle pourrait apporter de la matière pour la confection des 3 nouveaux panneaux de Ciao Italia.

Quelles sont les idées fortes à faire passer ? Au-delà des faits, qu’est-ce qu’il y a d’important à dire ?

6. Journée d’Étude et conclusion (55.30)

Il convient de souligner que, pour la confection des panneaux, nous nous référerons surtout à ce qui ressort d’une Journée d’Étude sur la migration coratine (une idée de notre comité de suivi scientifique), qui pourrait avoir lieu, dans un lieu qui reste à fixer, peu près la réunion publique au Musée Dauphinois.

Louise Luquet nous informe que du point de vue du Musée de l’Immigration, il y a une liberté pour ce qui est de la programmation de la rédaction de ces nouveaux panneaux.

Catherine exprime ce qui est aussi sa propre identité d’émigrée en Italie, ne sachant plus vraiment quel est son pays, entre la France et l’Italie. Elle voudrait aussi dire qu’elle soutient en particulier ce que Anne-Marie nous a dit :

– pour la confection des nouveaux panneaux, il faudrait ne pas faire ce qui a déjà été fait et s’inscrire dans un grand mouvement des historiens de l’immigration qui est de revisiter l’histoire de la migration après plusieurs générations, avec en toile de fond tous les discours et tensions sur l’immigration actuelle. Il faut se situer dans un contexte plus large que la seule migration coratine ;

-elle poursuit : « je crois qu’effectivement la numérisation des archives de la paroisse de Corato doit rester pour nous un objectif, même si, si j’ai bien compris, James, vous êtes rentré de votre séjour de trois mois à Corato un peu découragé sur ce plan ; mais je pense que, comme dans beaucoup de choses, ça dépend des contacts interpersonnels et qu’il nous faut rester attentif au contact qu’on peut avoir sur place à Corato. Les personnes changent parfois… et on peut peut-être retrouver, comme ça été le cas il y a plusieurs années, un contexte plus favorable ; ou au moins, si on veut mettre quelqu’un sur ce sujet, par exemple du côté de Bari, avec Biagio ».

Anne-Marie : la question des archives est vraiment fondamentale. Il peut y avoir un dialogue entre les catégories d’archives, orales et documentaires. La numérisation, c’est une bouteille à la mer qu’on lance. La numérisation des archives est un mouvement qui avance, quoique lentement. Il ne faut pas se décourager. Il faut revenir sans cesse sur un métier pour arriver au bout d’un projet. (1.02.21)

Marseille, le 9 février 2023

James Smith,

Président,

Atelier Généalogique.

ateliergenealogique@gmail.com

1 Blog de l’Ethnopole 'Migrations, frontières, mémoires', Valence : https://lecpa.hypotheses.org/1813